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13e OEIL | Comme des chefs

 

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À l’heure où les programmes culinaires sont rois (Top chef, Meilleur pâtissier, Cauchemar en cuisine et, plus récemment, la série Chefs sur France 2), la cuisine semble faire de plus en plus rêver. Les cours pour amateurs en quête de tours de main pour épater leurs amis font le plein. Les tutorats sur le web génèrent toujours plus de clics. Certains vont même plus loin et décident de se reconvertir, de quitter un job après un bac+5 pour devenir cuistot. Et puis il y a ceux qui suivent dès l’adolescence une formation professionnelle ou, une fois le bac en poche, un BTS (brevet de technicien supérieur). Le 13 du Mois s’est intéressé au bac pro et à ses deux filières : la cuisine et la salle. L’une ne va pas sans l’autre et on l’oublie trop souvent. Reportage au lycée public Guillaume-Tirel, boulevard Raspail.

13h30. Comme chaque mardi, au programme de l’un des quatre restaurants d’application du lycée Guillaume-Tirel, c’est travaux pratiques suivis du service du soir. Cet après-midi est même un peu spécial, puisque le diner gastronomique aura pour thème le Portugal. Tous les élèves de terminale cuisine sont prêts, charlotte vissée sur la tête, parés de leurs tabliers et de leurs sabots de plastique. Et déjà, Rémi jubile : « Je suis Portugais ! », s’exclame-t-il fièrement. Pour encadrer ce petit monde, Vincent Dupuy, le professeur de cuisine que les élèves appellent « chef ». Après leur avoir présenté les produits, le menu et ses spécificités, l’enseignant constitue des duos et nomme un chef. Aujourd’hui, c’est Pierre, un grand gaillard plutôt à l’aise. « On travaille comme dans une vraie brigade sauf que ça tourne à chaque TP. Les élèves doivent maîtriser tous les postes », explique le professeur. Dans un premier temps, ils opèrent par deux sur une tâche. Certains semblent satisfaits de leur sort, d’autres un peu moins et le font sentir en grommelant et en traînant les pieds.

 

Ne pas s’égarer dans les bavardages

Une vingtaine de minutes s’est écoulée. Pas de temps à perdre car ce soir, le restaurant « Côté jardin » de Guillaume-Tirel affiche complet. Il y aura quarante-deux couverts. Pour éviter les mauvaises surprises, il faut peser tous les produits. « Allez, un peu plus vite ! », lance Vincent Dupuy, en distribuant des fiches censées apprendre aux élèves à bien gérer leur temps. Discrètes et concentrées, Carla et Savannah ont déjà attaqué la préparation de la brandade. Elles dépiautent la morue tandis que Marc démarre à son rythme sa gelée de Porto et se livre à quelques confidences : « Ce que je fais là me rappelle mon stage dans un gastro et ce n’est pas du tout mon truc. Je préfère la cuisine de petit bistrot », raconte le jeune homme de 17 ans, dont le rêve est d’entrer dans l’armée comme cuisinier. « J’attends la fin de l’année avec impatience, reconnaît-il. Mes parents aimeraient pourtant que je continue les études, mais je ne suis pas fait pour ça. » Fin de l’échange. Vincent Dupuy vient s’assurer que son élève « ne s’égare pas dans des bavardages ».

 

À l’autre bout de l’immense cuisine, au poste des desserts, une autre Carla s’est vue confier l’élaboration de tubes de sésame, la mission qui semble la plus périlleuse. Au moindre faux pas, la pâte se brise et il faut tout refaire. L’adolescente s’applique. Après plusieurs tentatives infructueuses et quelques encouragements de ses camarades, la voilà qui enchaîne les pièces avec brio. Vincent Dupuy passe d’un groupe à l’autre, prodigue quelques conseils techniques, vérifie le respect des normes d’hygiènes et rappelle à l’ordre ceux qui, comme Hamza, ont tendance à s’éparpiller. Avec lui, les vannes fusent et les autres se retrouvent rapidement entraînés.

La perfection jusqu’aux plus petits détails

15 heures, côté salle. Tailleur noir, chemisier, escarpins pour les filles et costume noir pour les garçons, les élèves de la section service débarquent. De la même manière que leurs camarades de cuisine, tous se voient attribuer un rôle pour la soirée et le prennent très à cœur. Il y a trois binômes, chacun constitué d’un chef de rang, chargé de présenter les menus et de prendre les commandes, et d’un commis préposé à apporter les plats. Sans oublier celui qui s’occupera de la plonge et le barman. En attendant, tout le monde s’active au dressage des tables. Kevin scrute les assiettes et les verres, à l’affût de la moindre trace, tandis que Denise vérifie que rien ne manque sur le bar car c’est elle qui servira les apéritifs, les cocktails et les cafés. Leur professeur, Pierre Rodrigues, soigne la décoration, réajuste un cadre au mur, déploie un drapeau du Portugal, dispose des azulejos sur le bar. « Tout doit être parfait, dans le moindre détail », insiste l’enseignant. Il est épaulé par Florian, qui occupera ce soir le poste dit d’ « accueil tournant ». Il devra placer les clients et se rendre disponible pour aider celles et ceux qui en auraient besoin.

 

[...] La suite de ce reportage est à découvrir dans le 13 du Mois #49

Publié par Laurence Gonthier  le 19 Mars 2015
 
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